Le Tour Courbet ! - du 24 au 29 /01/07
La manip' royale du VAT (volontaire civil à l'aide technique) ornitho à Kerguelen : le Tour Courbet!
Nous sommes partis 5 jours et demi avec mon collègue de la 57e et deux
"manipeurs" de très bonne volonté et aguérris physiquement.
Cette manip' consiste à faire le tour de la Péninsule Courbet (au
nord-est de Kerguelen) à pied tout en effectuant certaines observations
sur les oiseaux et les mammifères marins.
La balade fait près de 150 Km, en dehors de tous sentiers (il n'y en a
pas) et à travers pierriers et marécages (souilles). C'est une occasion
de voir des sites magiques où quasiment personne ne va pour des raisons
d'accessibilité, en particulier sur la côte nord donnant directement
sur l'Océan austral.
Voici dans ce qui suit quelques petits clins d'oeil aux espèces et aux paysages rencontrés. Nous commencerons par la côte nord frappée de plein fouet par la mer, côté marquée par ses albatros et ses gorfous, puis nous ferons un détour par les manchotières sur l'est de Courbet...
La rivière Cataractes au nord-ouest de la Péninsule Courbet :
À l'occasion de notre première nuit en cabane pour ce Tour Courbet, les vents ont atteint 60 Noeuds...soit 110 Km/h. Heureusement, le front nous a rapidement quitté le lendemain matin! Ouf!
Zone humide entre Cataractes et le Cap Cotter :
Le Mont Campbell, protubérance rocheuse dominant Courbet avec ses 143 m d'altitude :
Entre Cap Cotter et Cap Noir, laisse de mer bien surprenante :
Ce n'est qu'un arbre me direz vous...mais il n'y ni arbres, ni arbustes
à Kerguelen. Sur cet archipel de la taille de la Corse, la rudesse du
climat, en particulier les vents très violents, ne laissent aucune
chance aux ligneux pour se développer.
Quelle est l'origine de cet arbre? Australie, Madagascar, Afrique du Sud? Nous ne saurons sans doute jamais.
Dans la série des découvertes surprenantes...nous sommes tombés sur un os...
Des vertèbres de baleine.
Dans la série des découvertes, nous avons observés des restes de navires victimes de naufrage au large des côtes de Kerguelen... Ces vestiges de déboires maritimes me donnent froid dans le dos en me renvoyant à des lectures de récits d'expéditions du XVIIIe et XIXe siècles... Des hommes y sont restés, ici, dans des mers démontés.
Restes d'étrave :
L'une des gorfoutières (Gorfou macaroni) de Cap Cotter :
des gorfous parfois sur plus d'1 Km de long en colonie... Des sites côtiers totalement magiques.
Sur les 150 Km, notre équipe composée de deux binômes, a contrôlé près de 400 nids de Grand Albatros, le roi des mers avec ses 3,60 m d'envergure!
Contrôle minutieux de bague sur adulte incubateur (mâle dans ce cas) :
Contrôle opportuniste d'un non reproducteur :
Ici la photo d'un magnifique mâle. Pendant que la femelle ou le mâle
couve l'unique oeuf, le partenaire s'en va en mer pour environ une
semaine durant laquelle il parcourt jusqu'à 15 000 Km! Autre record,
les scientifiques estiment que certains individus dépassent les 80 ans.
Les individus âgés de 20 ou 30 ans ne sont pas rares.
La première reproduction intervient en moyenne à l'âge de 11 ans.
Le Tour Courbet a aussi été l'occasion de compter les jeunes otaries (Otarie australe), en particulier sur les grandes colonies, notamment au Cap Rohan et au Cap Noir. Il s'agit de plusieurs milliers d'individus.
Femelle avec son jeune :
Deux jeunes otaries dont une qui vient de prendre son bain en rivière avec ses congénères :
Et pour les fidèles de ce blog, voici enfin la résolution de l'énigme "Arctocephalus gazella", le doux nom scientifique de notre Otarie australe. "Arctocephalus" signifie tête d'ours et "gazella" fait selon moi référence à la ligne fine de l'otarie. On retrouve "Arct-" dans Arctique (Pôle Nord) en référence à la présence de l'Ours polaire, l'Ours blanc. À l'inverse, Antarctique (Pôles Sud) signifie à l'opposé des contrées septentrionales de l'Ours (blanc) et rappelle bien l'absence de cette espèce dans l'hémisphère sud!
Pas d'Éléphant de mer austral au programme, ce sera pour le prochain Tour Courbet avec le comptage des individus des harems. Il n'empêche que nous avons rencontré des mâles imposants au cours de notre périple.
Mon collègue Quentin face à un mâle de phoque austral :
J'estime l'animal à 1,3 à 1,5 t :
Et pour finir en beauté, nous sommes passés au niveau de plusieurs manchotières (Manchot royal) : mes premières vues à terre à Kerguelen! Le but était de dessiner les contours de colonies au GPS afin de connaître leur surface et de déterminer la densité d'animaux par recoupement avec des photos obliques prises par hélicoptère en décembre dernier (comptages aériens).
Voici la colonie nord du Cap Digby avec un effectif frôlant probablement les 30 000 couples reproducteurs :
Et la fameuse colonie de Ratmanoff vue de la porte de la cabane ! Plus de 170 000 couples reproducteurs ! L'archipel des Kerguelen compte plus de 280 000 couples. Pour comparaison, l'archipel des Crozet totalise 455 000 couples c'est à dire plus de la moitié de la population mondiale de Manchot royal!
Ce site sera mon nouveau domicile pour le mois de février. En effet j'y effectuerai une longue manip' avec mon collègue et prédécesseur Yohan. La cabane donne directement sur la colonie, vue imprenable de la fenêtre de la cuisine! Je vous raconterai.
Et me direz vous, le guerrier dans tout cela, que devient-il?
Et bien le guerrier est au repos pour deux jours. Il est fatigué avec
ses 150 Km dans les pattes, mais heureux! Et il vous remercie pour
tous vos messages sur son blog et son mél qui lui font chaud au coeur!
Prochaines nouvelles sans doute dans un mois, à son retour sur base. Il vous salue bien!